La mauvaise éducation (Pedro Almodóvar, 2004)

Publié le 13 Août 2015

Dans les années 1980, Enrique retrouve Ignacio, un ancien ami du collège, avec lequel il a vécu une histoire d'amour empêchée par le père Manolo, professeur de littérature dans l'établissement où ils étudiaient, et épris d'Ignacio.
Ce dernier donne à Enrique, devenu réalisateur, une nouvelle qu'il a écrite inspirée de son/leur enfance, dans l'espoir qu'elle devienne un film. Enrique est emballé, sauf que...

Oui, sauf que... Sauf qu'il faut l'admettre : je n'aime pas le cinéma de Pedro Almodóvar. Ou du moins je n'aime plus : je garde un bon souvenir, même si celui-ci date un peu, de Talons aiguilles. Mais depuis Tout sur ma mère, je pense n'avoir aimé aucun de ses films.
Pourtant, c'est de bonne facture. L'image est belle, le scénario savamment construit, les différents récits qui s'emboîtent et s'enchaînent peignent un tableau très bien fait, très bien conçu. Sauf que : c'est un (mélo)drame, et que ça ne me touche pas. Je trouve les ficelles grosses, malhabiles, convenues. Mais sans vraiment arriver à me l'expliquer complètement, clairement, ce qui m'interroge un peu.
J'ai été touché par les scènes montrant les deux jeunes adolescents se rencontrant, s'aimant crûment et secrètement, et la figure légèrement terrifiante du père Manolo. C'est à la fois beau, simple, touchant, et terrible. J'aurais même aimé que ça dure plus longtemps, voire que tout le film soit sur ces personnages. Tout le reste m'a, avouons-le, ennuyé.
Peut-être est-ce parce que ça manque de subtilité : le travesti est forcément un junkie, l'homosexuel est forcément trahi et déçu, l'autre est forcément un menteur, un assassin, un égoïste, un homophobe... Les ficelles sont grosses, jusqu'à la toute fin, qui raconte le destin des personnages après le film, que j'ai trouvé franchement ridicule, parce que terriblement cliché, terriblement attendue. C'est peut-être ça qui me gène : d'une certaine façon, tout est prévisible et convenu, même les révélations auxquelles on ne s'attend pas, qui sont toutes trop grosses pour être honnêtes. Le fond de ma pensée, c'est que certaines ficelles de scénario iraient parfaitement bien dans Les Feux de l'amour ( *** spoiler *** « Comment, tu veux dire que tu n'es pas Ignacio, mais Juan, le frère d'Ignacio, qui est mort ? – Ah, oui, c'est vrai, je le confesse. – Oh, je le savais. – Comment, tu veux dire que tu le savais ? Mon Dieu, je le savais ! – Mais si tu savais que je savais, pourquoi as-tu continué à jouer le jeu ? – Et toi, pourquoi n'as-tu rien dit ? – Parce que je voulais savoir jusqu'où tu irais... Et jusqu'où je serais capable de le supporter. » Bravo Pedro, c'est très subtil. *** spoiler *** )
Je sais bien, pourtant, que tout ça est, d'une certaine façon, « réaliste », que ces personnages, ou des semblables, ont sans nul doute existé dans la vraie vie, mais le « vrai » et le « crédible à l'écran » ne sont pas du tout la même chose. Je sais bien que c'est un des films les plus personnels d'Almodóvar, pourtant tout ça manque d'une étincelle de vie, qui donnerait de la chair à des personnages qui ne seraient pas que des archétypes.

Allez, un détail qui m'a amusé : Gabriel Garcia Bernal, bien que beau gosse, est notoirement plutôt petit. Est-ce un hasard si la moitié des plans dans lesquels il joue sont en contre-plongée ?

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma, #Espagne

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