Fumer fait tousser (Quentin Dupieux, 2022)

Publié le 30 Décembre 2022

Pour commencer, il y a les Tabac-Force : un groupe de cinq Power Rangers (Gilles Lelouche, Vincent Lacoste, Anaïs Demoustier, Jean-Pascal Zadi et Oulaya Amamra) qui utilisent le pouvoir négatif du tabac pour tabasser des gros montres en caoutchouc. Après une nouvelle victoire, chef Didier, une marionnette de rat qui bave un truc vert absolument dégueulasse, leur offre quelques jours de repos au bord d'un lac, ce qui leur permettra d'améliorer la cohésion du groupe. Les Tabac-Force en profitent pour raconter des histoires qui font peur.

Nous aurons droit à trois histoires. Gilles Lelouche raconte des vacances avec deux couples. Après avoir enfilé un vieux « casque à pensée », une des femmes va passer le week-end à cogiter, et finir par assassiner tout le monde.
Une petite fille raconte l'histoire d'un poisson qui voit un type déverser des déchets toxiques dans le lac (« ça a compètement gâché l'ambiance »).
Gilles Lelouche pêche un barracuda dans le lac, qui, pendant qu'il cuit, raconte l'histoire d'un jeune qui tombe dans une broyeuse de scierie, mais « ça va ».
Mais les Tabac-Force sont appelés en urgence par chef Didier : Lezardin a prévu de détruire la Terre, la seule solution est d'appeler à la rescousse Norbert 1200, leur robot, qui s'avère moins efficace que prévu.

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Quentin Dupieux nous montre ici son deuxième film de l'année, après le formidable Incroyable mais vrai, que je crois avoir préféré : comme dans Le Daim, il tire quelques fils narratifs, et hop c'est bouclé. Fumer fait tousser donne l'impression de partir dans tous les sens, puisqu'il joue sur plusieurs récits. Je n'ai évidemment rien contre les récits enchâssés, c'est un procédé classique et qui marche souvent très bien ; je crois que ce qui marche moins bien pour moi, c'est que le récit principal est trop fort : j'aurais adoré ne voir qu'un film avec les Tabac-Force ! C'est paradoxal : je reproche à Dupieux d'avoir de trop bonnes idées. Peut-être suis-je également gêné par le fait que les différents récits n'aient aucun lien les uns avec les autres (ni personnage, ni lieu, ni thématique).
Passé cette petite réserve, et même si ce ne sera pas mon Dupieux préféré, c'est souvent très drôle, c'est très gore, c'est bien joué, bien écrit, bien filmé : la qualité Quentin Dupieux® est toujours au rendez-vous.

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Quentin Dupieux est un cinéaste dont je peine à voir la filiation. Je vois toute une famille de cinéma qui va des Monty Python aux Nuls, mais ça ne suffit pas. Ses films sont bizarres, ils intègrent souvent une bonne dose de fantastique, d'illogique, d'impossible, qui dépasse le simple « absurde » des comiques précités.
Dans ses films, on croise des blousons qui parlent, des humains liquéfiés transportés dans des seaux dont la bouche parle encore pour dire que tout va bien, des poissons en train de cuire qui parlent, des passages secrets qui permettent de rajeunir, des bureaux dans lesquels il pleut, des palmiers qui se transforment en sapin (Wrong), des VHS dans des entrailles (Réalité)… Tout un tas de trucs étranges, impossibles, parfois drôles, parfois carrément angoissant et/ou flippant – ses films ne sont d'ailleurs pas toujours des comédies.
Il a aussi, comme on peut le deviner dans la liste précédente, un goût certain pour le gore, le kitch (dans Fumer fait tousser, les costumes des Tabac-Force, les monstres, les robots)…
Tout ça me fait penser à des cinéastes comme David Lynch, toujours cité comme référence devant des trucs qu'on ne comprend pas.
Je suis sûr que des gens plus intelligents et cultivés que moi sauraient trouver d'autres références.

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #au cinoche, #cinéma, #comédie, #fantastique, #France

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