Les insurrections singulières (Jeanne Benameur, 2011)

Publié le 9 Avril 2017

Antoine est perdu. Il vient de se faire larguer par Karima, il est retourné vivre chez ses parents, qui sont bienveillants mais désarmés. Tranquilles, immobiles. Un père qui travaillait à l'usine, le corps affaissé par le labeur, une fierté ouvrière qui ne se dit pas.
Antoine est perdu. Il ne s'est jamais senti à sa place, rarement au bon endroit. Il a une envie, une ardeur, une rage en boule dans son ventre mais peine à lui trouver un objet. Il n'a pas les mots, pas la parole. Karima était enseignante, pleine de mots, elle lui reprochait d'en manquer.
Antoine a travaillé à l'usine. Son père le regrettait, qui rêvait d'un meilleur avenir pour son fils. Mais il veut dire quoi de la vie de son père, ce regret ? L'usine va être délocalisée au Brésil. Antoine s'investit à plein dans le combat syndical, trouve une place pour sa colère, pour une partie seulement.
Antoine va aider sa mère qui va les week-end au marché, petite mercière. Il rencontre Marcel, bouquiniste, qui va l'amener à la rencontre des livres auxquels il s'est toujours senti étranger. Il va lui parler et aider Antoine à se construire et à trouver des mots. À trouver un sens, un but.

Sombre par moments, plein de lumière à d'autres, Les Insurrections singulières est un roman fort et singulier, vivant, incarné, plein de chair et de vie. Il décrit l'évolution progressive, complexe et émouvante d'un personnage. Il y est aussi question de la langue et des mots, présents ou absents. Du pouvoir de la parole, de son importance. De la parole comme sculpture de soi : non pas s'en abreuver ou s'y perdre, mais s'y façonner, avec ses mots et ceux des autres, des amis, des proches, des gens rencontrés.

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #littérature

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