Publié le 27 Mars 2022

Dans ce film où les acteurs jouent leur propre rôle, tout commence dans un restaurant. Jean-Pierre Marielle commande un pot d'eau chaude pour diluer son café, mais personne ne l'entend : un acteur qu'on écoute plus, c'est un acteur fini. André Dussolier et Jacques Villeret, qui accompagnent Marielle, partent dans une sorte de quête pour à la fois aider et surveiller Marielle.

C'est un film absurde, sans queue ni tête, et c'est pensé comme ça. On y croise un bon paquet de (déjà) vieux acteurs français, au point qu'aujourd'hui beaucoup sont morts. Outre ceux déjà mentionnés, on peut citer Arditi, Bemondo, Piccoli, Claude Rich, Michel Serrault, Galabru, Brialy, Claude Brasseur, Delon, Depardieu… Jean Yanne joue un médecin, Albert Dupontel une sorte de nazi : c'est difficile de ne pas voir l'acteur derrière le rôle dans cette situation, c'est un peu étrange. Tout ça est d'ailleurs très masculin, peut-être même masculiniste (Josiane Balasko qui joue André Dussolier).
Une fois qu'on a dit ça, on n'a pas dit grand chose du film lui-même : c'était long et très bavard. C'est parfois un peu drôle, mais cette drôlerie est diluée dans des scènes dont on ne voit pas le bout. Blier se regarde écrire, se regarde dialoguer, c'est parfois brillant mais ça tombe souvent à plat ; c'est très théâtral, mais d'un théâtre un peu ringard.
Dans l'absurdité des situation, dans leur étrangeté qui confine parfois au malaise, il y a quelque chose de Quentin Dupieux dans ce film (Réalité, Wrong, Le Daim). Mais ce dernier, à mon avis, parvient à être sur le fil, et il a l'élégance de ne pas faire des films trop longs.

Voir les commentaires

Publié le 27 Mars 2022

Cet essai est une compilation de la recherche sur la situation des femmes, en particulier en lien avec le monde du travail : salaire, temps de travail, marché marital, travail domestique… C'est un livre dense, très intéressant, avec une très longue bibliographie, qui permet si l'on veut d'aller plus loin (j'avoue j'ai pas trop fait).

* * *

Je n'ai pas pris de notes, mais je mets le sommaire, qui raconte beaucoup de ce dont parle le livre, ainsi que quelques extraits récapitulatifs.

I. Les inégalités femmes-hommes au XXe siècle
1. Les guerres mondiales et la progression du travail des femmes
2. La génération du baby-boom, la pilule, et la progression des femmes dans le monde du travail dans les années 1960 et 1970
Le baby-boom et le marriage squeeze / La pilule / Le prix du sexe / Les changements législatifs dans les années 1960 et l'interdiction de la discrimination / Les « machines de la libération » : machines à laver et autres matériels électroménagers / La nature du travail des femmes

On l'a vu : le baby-boom, la pilule et (peut-être) la diffusion au sein des ménages du matériel électroménager ont entraîné une hausse de la participation des femmes (blanches et mariées – puisque les femmes racialisées travaillaient déjà) au marché du travail dans les années 1960-1970. Mais, malgré ces progrès, les femmes restent dans des secteurs et métiers traditionnellement féminins, peu qualifiés, peu rémunérés, dans des catégories et des échelons remaniés pour les exclure des progrès salariaux et même de la couverture syndicale. Les femmes profitent donc très peu des progrès salariaux : l'écart des salaires est stable dans les années 1960-1970, et les femmes gagnent toujours environ 40% de moins que les hommes.
Cependant un grand changement est en train de s'opérer : les femmes s'éduquent, de plus en plus, préparant leurs progrès fulgurants dans les années 1980. (p. 49)

3. Des progrès fulgurants des années 1980 à la stagnation de la décennie suivante

Ainsi, alors que les femmes ont progressé dans la vie professionnelle, elles sont toujours exclues (au moins celles d'entre elles qui sont mères) des professions les plus rémunératrices, tandis qu'au même moment les plus hauts revenus se sont envolés. Telle est la situation à la fin des années 1980. Et depuis, pas grand-chose. Les gains des femmes ont stagné : en 2010, aux États-Unis, elles gagnent toujours 20% de moins que les hommes en moyenne.
Comme nous l'avons vu, les progrès – ou plutôt leur absence – sont encore et toujours liés à la parentalité, qui nécessite interruptions, horaires plus flexibles, durée de travail réduite et temps partiel ; tout ce qui incombe encore malheureusement de façon disproportionnée aux mères (je vous le rappelle : la probabilité d'avoir travaillé à temps partiel est 62 fois plus élevée pour les mères que pour les pères dans l'échantillon d'avocats). Dans la deuxième partie du livre, nous nous pencherons plus précisément sur la quantification des effets liés à la maternité, en particulier par rapport à d'autres facteurs. Et nous montrerons que même si le fait que les femmes portent les enfants est une constante biologique, la « pénalisation » sur le marché du travail ne l'est pas. En effet, elle varie en fonction des attitudes culturelles du pays. Et elle est presque aussi élevée pour les mères d'un enfant adopté que pour un enfant biologique, montrant bien que la biologie n'a rien à voir là-dedans ! (pp. 54-55)

4. Quid du Covid ?
Le Covid-19 : une régression majeure pour les progrès des femmes ? / Des raisons d'espérer ?

II. Les explications changeantes des inégalités femmes-hommes
5. Des mesures de la discrimination
La décomposition des écarts salariaux / Le recours aux faux CV / Les autres études sur la discrimination
6. Le déclin des explications traditionnelles des écarts de revenus femmes-hommes : l'éducation et l'expérience
Le rôle de l'éducation / Expérience dans le monde professionnel et heures de travail : le rôle désastreux des interruptions de carrière / La pénalisation due à la naissance d'un enfant

Résumons : les femmes sont désormais plus éduquées, bien que des différences persistent dans le choix des filières (les sont toujours sous-représentées dans les filières scientifiques qui mènent aux professions les plus rémunératrices). Elles n’interrompent plus leurs carrières ni quand elles se marient ni, pour la plupart, lorsqu'elles ont un enfant. Ainsi, elles accumulent au cours de leur vie professionnelle presque autant d'années d'expérience que les hommes. Cependant, là aussi des différences persistent. Même si la plupart d'entre elles retournent travailler après la naissance d'un enfant, les femmes réduisent leurs heures de travail, optent pour des horaires plus flexibles, et pour les obtenir changent souvent d'employeur, en privilégiant la fonction publique ou des entreprises plus family-friendly et moins rémunératrices. Ainsi, si la quantité de travail ne change pas forcément (ou peu), la qualité de leur métier se modifie. Et ce bouleversement est associé à une grosse perte de revenus, d'autant que le niveau de responsabilité qu'on leur offre ou qu'elles acceptent change aussi. Mais ces différences systématiques de métier, position hiérarchique, industrie sont, bien sûr, également préexistantes à la maternité, et constituent un facteur explicatif très important, majoritaire et croissant, des inégalités de revenus. (p. 98)

7. Industries et métiers
La ségrégation femmes-hommes dans les métiers et son évolution / Le plafond de verre / Les caractéristiques des métiers les plus rémunérateurs : de la difficulté à concilier travail et famille

Les normes culturelles et l'identité de genre influencent donc nos choix d'éducation (mathématiques ou non), notre réussite à l'école – de par nos propres peurs et de par le comportement de professeurs qui renforcent les stéréotypes –, nos choix de métier et d'industrie. Au sein d'une même profession, elles influencent nos chances de promotion, encore une fois à cause du comportement potentiellement discriminatoire des employeurs, mais aussi à cause de nos propres comportements, qui incitent les femmes à dissimuler leurs ambitions et leur compétitivité, à se rabaisser, à éviter les négociations, à accepter des tâches inutiles pour leur carrière de peur de dire « non ». Et elles influencent pour fini la répartition des tâches à la maison et la façon dont le succès professionnel des femmes affecte leur vie personnelle, de mères et d'épouses. (p. 125)

III. L'origine des déterminants culturels de la participation des femmes au marché du travail et leur évolution
9. La spécialisation historique des femmes et des hommes dans l'économie
Les sociétés de chasseurs-cueilleurs / La régression des femmes avec l'avènement de l'agriculture
10. Les chocs démographiques
11. Les normes de la masculinité et leurs répercussions sur le travail, la violence, la santé et le politique
12. Comment changer les normes ? L'importance de l'information et de la coordination

IV. Les normes de genre au sein des entreprises : comment consolident-elles le plafond de verre et quelles politiques mettre en place ?

Dans cette dernières partie, nous allons passer en revue les différentes initiatives privées et publiques qui ont été mises en place au cours des dernières années pour lutter contre les inégalités femmes-hommes, et étudier leur efficacité. Dans un premier temps, afin de mieux comprendre leur contexte de l'inégalité économique femmes-hommes, nous plongerons au cœur des entreprises pour examiner la façon dont se manifestent les normes culturelles  genrées et dont elles bloquent l'ascension des femmes. Cela nous permettra de mieux saisir la subtilité (ou non) de ces normes et de leurs manifestations, au-delà des mesures agrégées que nous avons utilisées jusqu'à présent (participation des femmes au marché du travail, écarts salariaux). Nous pourrons ainsi ensuite mieux imaginer les types d'initiatives qui pourraient avoir un impact réel. Nous étudierons enfin l'efficacité des politiques publiques, du congé parental jusqu'aux quotas dans les conseils d'administration, et leurs limites. (p. 169)

13. Normes de genre dans les entreprises et harcèlement
Culture d'entreprise de genre / Harcèlement au travail et harcèlement sexuel
14. Les politiques publiques à mettre en œuvre
Les politiques familiales / Peut-on légiférer le changement social ?
15. Les quotas en politique et en entreprise
Les quotas en politique / Les quotas dans les entreprises

Finalement, garantir la progression des femmes dans l'économie et la politique requiert de défaire les normes de genre aussi bien au sein des entreprises (et des Parlements) que des ménages. Il faut conjuguer une politique de la famille visant à faciliter la conciliation des carrières des femmes et de leur vie familiale avec non seulement une protection de l'emploi, comme c'est le cas actuellement, mais aussi une garantie de progression et de représentation féminine à tous les échelons intermédiaires de la hiérarchie, et pas seulement tout en haut. Cela peut se faire simplement avec la mise en place de quotas à tous les niveaux hiérarchiques. Ces quotas ne sont pas forcément stricts. […] La part plus grande de femmes à ces échelons aura aussi des répercussions positives sur le harcèlement sexuel, puisque le harcèlement est plus fréquent dans les milieux professionnels plus masculins.  Il faut de plus s'efforcer d'évaluer et de rendre publiques, comme on le fait de bilans financiers, les expériences de harcèlement sexuel au sein des entreprises, qu'il est facile de mesurer, ainsi que la part des femmes à tous les niveaux hiérarchiques, et pas seulement les index globaux, les politiques d'égalité femmes-hommes au sein de l'entreprise, et plus généralement la culture de genre de l'entreprise. Si les entreprises sont pénalisées par le manque d'attention qu'elles apportent actuellement à ces problématiques, par exemple parce que les diplômés les plus talentueux refusent d'y travailler, alors un changement s'amorcera. Pour l'instant, tout est encore enfoui sous le tapis. Il est temps que cela change. Les moyens existent pour que ce soit le cas. (p. 194)

Voir les commentaires

Publié le 20 Mars 2022

Pendant l'Occupation, dans un village provincial, une femme juive, penchant du côté du Communisme (Emmanuelle Riva, formidable), baptise sa fille pour éviter qu'elle ait des ennuis avec les Allemands. Par défi, elle va confronter l'abbé Léon Morin (Jean-Paul Belmondo) sur le terrain de la religion.

Et les dialogues bavards sur la religion qui s'ensuivent sont, soyons honnêtes, d'un ennui profond. Je suis certain qu'ils pourraient intéresser des Catholiques, mais ce n'est pas mon cas.
Ce n'est d'ailleurs pas un film très réussi à mon sens. Il est adapté d'un roman de Béatrix Beck par Melville lui-même, et ce dernier est sans doute resté trop proche du livre. Certaines scènes, très courtes, semblent être un résumé d'un passage plus développé dans le livre. Il aurait sans doute été préférable de couper ces passages inutiles et manifestement expédiés. Ça donne parfois l'impression d'un patchwork malhabile. La voix off (Emmanuelle Riva qui résume ce qui se passe) n'est pas trop appuyée.
Il faut aussi dire que ce n'est pas toujours très bien filmé : il y a des raccords dans l'axe maladroits (rien à voir avec ceux, maîtrisés, d'À bout de souffle), il brise la règle des 180°… Le reste n'est pas suffisamment notable pour rester dans ma mémoire.

Voir les commentaires

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma, #France

Publié le 15 Mars 2022

David Ladislas (Jena-Paul Belmondo) est chargé de convoyer illégalement une voiture cachant de l'or jusqu'au Liban. Pour se faire passer pour un journaliste en reportage, on l'associe à Olga Celan (Jean Seberg), femme présentée comme froide et distante. Évidemment les choses ne vont pas excatement se passer comme prévu.

Disons-le tout net : c'est pas terrible. C'est un film de gangsters assez prévisible, filmé dans un noir et blanc qui lorgne vers le film noir américain. Pas de vrai reproche à faire, mais ce n'est pas novateur (comme pouvait l'être À bout de souffle), ni à la hauteur des modèles américains.
Pas mal de scènes sont tournées en studio, est-ce qu'on peut dire que c'est Nouvelle vague quand même ?

On retrouve le couple Belmondo/Seberg d'À bout de souffle. Bébel joue encore une fois le rôle de gros lourd qui se croit drôle. Seberg l'envoie chier plusieurs fois, il peine à comprendre et insiste. C'est gênant. À un moment, il traîne avec deux filles à la fois, et il tire à pile ou face celle avec laquelle il va conclure, et c'est drôle, parce que… ah bah non, c'est pas drôle.
Quand il finit par insulter Jean Seberg (encore !), elle se dit qu'elle pourrait coucher avec lui (!). Mais elle garde ses lunettes de soleil, en mode « on fait du sexe, mais je vais oublier que c'est avec toi ». Je peine à comprendre ce que Jean Becker veut dire dans cette scène : je suis du côté de Seberg, et je constate que c'est elle qui mène la barque du film, qui prend les décisions, et en face Belmondo a l'air d'un grand couillon pas très malin. Pourtant, j'ai l'impression que Becker est du côté de Bébel (un type drôle, libre, inventif, face à Seberg, froide et distante).
C'est très étrange. La sympathie pour ce type m'échappe.

* * *

Et maintenant la preuve que je n'arrive PAS DU TOUT à dessiner Belmondo.

Voir les commentaires

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma, #France