Publié le 30 Décembre 2017

John Rambo est au beau milieu de nulle part pour revoir un ancien camarade du Viêt Nam. Il apprend que ce dernier est mort d'un cancer, contracté là-bas, à cause de l'« agent orange ». Errant dans les parages, il est viré de la ville, le shériff ne voulant pas de vagabond chez lui. Parce que Rambo et le shériff sont aussi têtus l'un que l'autre, Rambo se fait arrêter et s'évade. Tout le film est la chasse à l'homme menée pour retrouver ce type un peu taré et carrément dangereux.

C'est donc l'histoire d'un taré traumatisé qui se fait sa guérilla tout seul dans la forêt contre le reste du monde.
Alors que c'était un soldat d'élite, le meilleur des meilleurs, John Rambo est devenu une sorte de vagabond, avec les cheveux trop longs et qui pue. Tous ses coéquipiers sont morts, il n'a personne. Si, il y a son ancien colonel, qui vient aider à le retrouver. Hanté par ses fantômes, rempli jusqu'à l'os de traumatismes, Rambo est un type perdu, détruit, seul, effrayé, mais c'est aussi un type carrément dangereux : dans la forêt il construit des pièges terrifiants, de retour en ville il tire sur tout ce qui bouge et fait tout exploser. Mais il ne tue (presque) pas, et c'est pas lui qui a commencé à verser du sang. Le colonel prévient : c'est le meilleur, il aurait pu massacrer tout le monde mais ne l'a pas fait. Il veut juste qu'on le laisse tranquille.

Film d'action ? Film sur les ravages de la guerre, sur la fin du mythe de la toute-puissance de l'Amérique, sur les anciens soldats ? C'est un peu tout ça à la fois. Rambo est un fou qui se refait sa guerre dans les forêts pépères de la montagne, qui revit encore et encore les mêmes traumatismes jusqu'à en perdre le sens du réel. Il faut attendre la scène de fin pour qu'enfin éclatent les sanglots : ce n'était pas sa guerre, il ne s'en est jamais remis. On en a beaucoup parlé : le héros de guerre en pleurs, l'Amérique en pièces.
Mais tout le reste n'est qu'un film d'action musclé, plutôt bien mené même si un peu prévisible. Ça a le bon goût de ne pas être trop long (1h30).

Rambo est à la fois le méchant et le gentil du film. C'est le méchant : ultra-violent (il utilise des armes de guerre), rebelle face à la justice (il s'évade de prison en cassant tout sur son passage), destructeur (il fait tout péter), c'est un individu fou, dangereux, qui mérite qu'on mette des dizaines de gardes à ses trousses – et ce n'est d'ailleurs pas suffisant. Et en même temps, c'est le gentil – ou plutôt le héros : il ne voulait qu'un endroit où manger, il ne voulait de mal à personne. Les policiers le molestent, il ne fait que se défendre, il essaye de se rendre, on lui tire dessus... Et puis Rambo/Stallone est montré en majesté, tout-puissant.
C'est cette ambiguïté qui fait à mon sens toute la richesse du film : c'est un taré psychopathe, mais on compatit pour lui.

PS. J'ai failli oublier le plus important : c'est un film dans lequel il n'y a AUCUN personnage féminin (enfin si, un seul, dans les 5 premières minutes du film). Pas étonnant que je considère que c'est un film qui traite de virilité (et un film sexiste aussi obviously).

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Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma

Publié le 27 Décembre 2017

C'est l'histoire d'une amitié saugrenue entre Youseff Bensoussan, un jeune dealer voleur je-m'en-foutiste, et de Lambert, un pompiste de nuit dans une station Total. C'est une histoire de deal qui tourne mal, et de la vendetta sans illusion qui s'en suit.

On est en plein dans le film noir, et c'est beau et triste et fort et désespéré. Coluche est très bien dans ce personnage de vieil alcoolique inutile, Richard Anconina est formidable, plein de charme et de légèreté, et Philippe Léotard est formidable.
Tout cela se passe dans un Paris nocturne et cosmopolite, sale, grouillant et vivant, comme il n'existe quasiment plus - il y avait une grande boîte punk à côté de République ! La lumière est très belle, les images composées avec un classicisme précis et soigné.

Mais (car il y a un mais que j'ai soigneusement éludé) le personnage de punkette que joue Agnès Soral est vraiment à chier. Elle joue très bien, elle, et pendant la première moitié du film, quand elle se contente d'insulter tout le monde c'est très bien. Mais, outre un syndrome de la schtroumpfette, à quel moment Claude Berry s'est-il dit qu'une gamine d'une vingtaine d'années serait crédible en s'amourachant d'un vieil alcoolique taiseux et désabusé de la cinquantaine ?

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Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma

Publié le 27 Décembre 2017

Alors oui, je n'avais jamais vu Erin Brockovich. On a tous nos lacunes, et on fait tous ce qu'on peut.

Donc Erin Brockovich est une mère célibataire de 3 enfants, divorcée deux fois, au chômage et en galère. À force d'insistance, elle finit par se faire embaucher par le petit cabinet d'avocat qui l'avait défendue dans un procès perdu d'avance contre un médecin qui avait embouti sa voiture. Un dossier attire son attention : celui d'une proposition d'achat d'une maison, accompagné de dossiers médicaux suspects. Erin Brockovich mène l'enquête, et découvre une large pollution au chrome hexavalent, très dangereux, causée par la négligence et la malhonnêteté de la Pacific Gas and Electric Company. La mission d'Erin Brockovich devient alors d'aider les (très) nombreuses victimes à se défendre face à la grande entreprise arrogante.

Et c'est très bien tout ça. Réalisation sobre, bons acteurs, histoire bigger than life, fort fond féministe... Rien à redire.

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Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma, #féminisme

Publié le 21 Décembre 2017

Cerclon est une colonie humaine installée sur un satellite de Saturne, afin de fuir les guerres qui ravagent la Terre. Une grande cité sous cloche, entouré par la Zone du dehors, hostile et invivable, explorée de temps en temps par des individus un peu fous, rebelles et hors-la-loi. Cerclon est une démocratie totalitaire. Tout le temps, tout le monde surveille tout le monde, tout le monde note et évalue tout le monde. Tous les deux ans, lors du Clastre, les notes sont rendues publiques et les Cercloniens classés et renommés : en commencer par les 2-lettrés, les plus hauts placés dans la hiérarchie après les membres du gouvernement 1-lettrés, pour finir avec les 5-lettrés, les plus nombreux, les « derniers de cordée ».
Dans ce monde sévit la Volte, un groupe rebelle Volutionnaire qui vise à renverser le système, mené par Brihx, Obffs, Slift, Captp et Kamio (BOSCK, le Bosquet). Captp est le personnage principal du roman. Professeur de philosophie, surnommé Capt, c'est le leader de la Volte.
Le roman débute par une sortie de Captp dans le dehors avec Bdcht (alis Boule de Chat), qui deviendra rapidement son amante, et qu'il entraine dans diverses actions de la Volte, qui prennent de plus en plus d'ampleur.

(J'espère que ce n'est pas trop indigeste tout ça ; et encore, je n'ai fait que poser le cadre, sans rentrer dans le détail des nombreuses péripéties de ce long roman – plus de 600 pages).

La Zone du Dehors est donc le récit d'une révolte – pardon, d'une volte. Alain Damasio distille au fil du roman les éléments de cette société totalitaire, terrifiante en soi et parce qu'elle n'est pas si éloignée de la notre. Le bouchon est juste poussé plus loin, mais la plupart de ce qui est décrit peut être considéré être déjà en germe dans nos sociétés modernes occidentales (il parait même qu'un épisode de Black Mirror évoque une société où tout le monde note tout le monde). C'est donc un roman profondément politique, émaillé des discours et réflexions de Capt, qui s'étalent parfois sur plusieurs pages.
Cette Volte est par moments super enthousiasmante, portée par un collectif beau et puissant, à d'autres moments un peu déprimante, lors des échecs, des renoncements, des impasses. Mais c'est sans doute le lot de toutes les révoltes de comporter ce genre de moments.

Mais ce qui me pose le plus question est la personnification à outrance de cette Volte, qui repose quasiment uniquement sur les épaules de Captp. Figure christique un peu convenue (il porte la bonne parole, revient du Royaume des morts, guide le peuple), c'est certes un moteur narratif efficace mais qui me gène politiquement – je ne crois ni au Christ ni à l'Homme providentiel qui sauvera l'Humanité qui ignore qu'elle a besoin d'être sauvée.
Autant le dire, j'ai trouvé qu'il y avait parfois des longueurs dans ce roman, notamment dans les discours et réflexions politiques, qui sont souvent intéressantes mais dans lesquelles Damasio se complait un peu (il s'écoute un peu parler) – et puis bon, une démarche anarchiste menée par un seul homme, en concertation avec quatre autres mecs (le Bosquet), avec mépris de ceux qui ne sont pas assez radicaux, « la Molte », on a vu mieux. Il y a de beaux moments, des actions fortes, des images qui me restent en tête, mais c'est un roman bien moins bon que son suivant, La Horde du contrevent, qui a un souffle que je n'ai pas retrouvé dans celui-ci. On retrouve le principe du roman à plusieurs voix, mais dans un état très embryonnaire par rapport à La Horde.
Et puis bon, c'est un roman sexiste : il ne passe évidemment pas le test de Bechdel dans la mesure où il n'y a quasiment qu'un seul personnage féminin (Bdcht) (syndrome de la Schtroumpfette bonjour). Ajoutez à cela que globalement les hommes pensent et agissent alors que les femmes ressentent, une touche de virilisme, une réduction fréquente de Bdcht à son corps, et enfin un appel au viol (agression gratuite d'une femme jusqu'à « j’ai envie de la violer »), on arrive à un beau cocktail bien dégueulasse. Ajoutez, vers la fin, un rappel constant que la maffia est israélienne (alors qu'aucune autre nation n'est mentionnée ou presque), on arrive à un truc pas très beau finalement, qui me fait regarder le travail de Damasio d'un autre œil... Dommage, j'avais pourtant tant aimé La Horde...

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Publié le 10 Décembre 2017

À la fin des années 1950, Anderson arrive dans une institution scolaire américaine pour garçons très stricte. Mr. Keating (Robin Williams), un nouveau professeur de littérature anglaise, fait vite une forte impression sur ses élèves, par sa manière d'enseigner assez originale, par son désir d'émanciper ses élèves, par son approche romantique de la littérature et de la poésie, par son incitation au Carpe diem (profiter de l'instant présent bla bla bla).
Un petit groupe d'élèves dont fait partie Anderson décide de recréer le Cercle des Poètes Disparus : fondée par Keating, cette société secrète, finalement bien innocente, se retrouve dans une grotte à proximité de l'école pour réciter des poèmes – et rire et faire des bêtises.
Il y a des histoires avec une fille endormie que l'on embrasse alors qu'elle est bourrée (nota : ce n'est pas bien de faire ça, du tout du tout), un appel téléphonique de Dieu, des filles qui assistent à une réunion.
Neil se découvre une passion pour le théâtre, ce que ne tolère pas du tout du tout son père, plus que strict. Dévasté par l'opposition de ce dernier, Neil se suicide d'une balle dans la tête. Keating sert de bouc émissaire, il est viré de l'école. En allant chercher ses affaires, dans un dernier geste de courage et de bravoure, ses élèves montent sur les tables pour le saluer.

Le Cercle des poètes disparus est le genre de film qui est précédé par une réputation qui le dépasse. En quelques mots : ce n'est pas un mauvais film, mais il ne m'aurait pas marqué s'il sortait aujourd'hui (d'ailleurs je l'ai vu ado et il ne m'avait déjà pas marqué vu le peu de souvenir que j'en avais). Ce n'est pas vraiment qu'il est daté, mais plutôt que je trouve qu'il ne correspond pas à notre époque. Je trouve ça bien, mais pas « waou c'est vraiment un film culte. » Manifestement il collait mieux à cette toute fin des années 1980 (?) Je n'en sais rien, je ne suis pas sociologue.
Aujourd'hui, donc, qu'est-ce qu'il reste de ce film ? C'est très bien interprété, plutôt bien écrit et plutôt bien filmé – malgré quelques ralentis un peu douteux. Il y a quelques longueurs, et quelques raccourcis : à l'arrivée de Keating, plus rien n'existe en dehors de ce professeur, des quelques élèves du Cercle et du sévère surveillant. Pas d'autres élèves (ou juste en figuration), pas d'autres professeurs... (je ne peux pas m'empêcher de penser à l'impressionnant film choral qu'aurait pu faire Robert Altman à partir de ce canevas). De la même façon, le suicide de Neil semble un peu téléphoné : rien ne nous annonce que ce personnage aurait pu commettre un tel geste, lui qui semble si fort, pour les autres et pour lui-même – mais je sais aussi que c'est un peu idiot de chercher à rationaliser ce genre de geste.
Reste une question : Keating est-il vraiment un bon prof ? Si on peut louer la volonté d'émanciper les élèves, de les faire penser par eux-mêmes, de les élever à la poésie, on peut regretter certaines méthodes un peu douteuses, notamment celles qui ont trait à l'humiliation publique. Lycéen, j'aurais probablement été un peu fasciné par ce prof, mais aujourd'hui probablement que j'aurais eu plus de mal avec cette tendance à afficher les élèves.
Bref, le film est de toutes façons sauvé par la formidable, belle et forte scène de fin du film.

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Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma