Rushmore (Wes Anderson)

Publié le 15 Octobre 2015

Max Fisher (le tout jeunot* Jason Swartzman) est étudiant à Rushmore, une école privée prestigieuse, dans laquelle il est rentré en tant que boursier. Rushmore, c'est toute sa vie. Il dirige une bonne dizaine de clubs et d'associations diverses (rédacteur en chef de la Yankee Review, président du club de français, de philatélie, de calligraphie, d'astronomie, d'escrime, de ball-trap, d'apiculture et j'en passe). C’est également un auteur de pièces de théâtre qui soulèvent des tonnerres d’applaudissements, et quelqu’un d’influent dans l’école, qui dirige des comités, signe des pétitions, et sait imposer ses idées à la direction.
La seule ombre dans ce tableau, c’est que c’est un élève moyen, voire légèrement médiocre.
Il devient petit à petit ami avec Hermann Blume (inévitable et impeccable Bill Murray), et proche de Rosemary Cross (Olivia Williams), jeune enseignante britannique récemment veuve. Mais tout ne se déroulera évidemment pas comme prévu, il y aura des cœurs brisés, des gnons dans la tronche, des expulsions, des réconciliations, des rencontres, des coupes de cheveu, des tentatives d'assassinat et d'autres pièces de théâtre.

Sorti en 1998, Rushmore est le deuxième film de Wes Anderson, après Bottle Rocket (que je n'ai toujours pas vu) et avant La famille Tenenbaum (qu'il faudrait que je revoie, tiens). On y trouve les prémices de ses films à venir, son style si reconnaissable est déjà là, mais dans une forme un peu embryonnaire. Ça n'empêche évidemment pas que ce soit un film totalement réussi et abouti, mais avec un cinéaste aussi unique que Wes Anderson, il est difficile de voir ses premiers films sans penser à ce qu'il fera par la suite.
C'est un film moins « fabriqué » que ses plus récents (je n'entends pas ce mot de façon péjorative). Son travail de l'image, à mon avis depuis La Vie Aquatique, donne un côté « faux » à ses films : ses jeux sur les cadres, sur les décors très théâtraux, sur les couleurs... La caméra est très présente à l'image : c'est du cinéma et ça ne s'en cache pas.
Ce qui n'empêche évidemment pas de voir surgir une émotion qui n'en est que plus forte, à mon sens. Contrairement à ce que disait Debord, dans les films de Wes Anderson, quand le vrai surgit du faux, il a une force étonnante et rare. Mais c'est possible parce que porté par des personnages qui, certes, peuvent avoir l'apparence d'archétypes purs, fixés dans un caractère définissable en quelques mots, mais qui réussissent à être superbement riches et complexes. Rushmore n'échappe pas à cette règle du cinéma de Wes Anderson, parce qu'il n'y a pas à dire, Wes Anderson (avec Owen Wilson sur ce film) est un scénariste brillant.
Le travail de l'image est ici moins poussé, moins fort. C'est très beau, mais c'est beaucoup moins stylisé (moins « faux », pour reprendre ce que je disais plus haut) que par la suite. Ça ressemble à un film normal, si je puis dire, encore que certains plans annoncent le développement de son travail à venir.
C'est donc un film à voir pour deux raisons : parce qu'il pose les jalons d'un travail à venir, qui est parmi les plus intéressants de ces dernières années, et aussi, simplement, parce que c'est un superbe film.

* * *

* Il a 17 ans au moment du tournage alors son personnage en a 15, mais il est tellement poupon que ça passe comme une lettre à la poste.

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma, #États-Unis

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