Zelig (Woody Allen, 1983)

Publié le 12 Octobre 2015

Ce film est un faux documentaire sur Leonard Zelig (Woody Allen, who else ?), l'« homme caméléon » qui est découvert au milieu des années 30 aux États-Unis. Cet homme, monstrueusement connu à l'époque, a un tel désir de se mêler aux autres, de ne pas se faire remarquer, de se faire aimer, qu'il change physiquement d'apparence et de personnalité en fonction des personnes qu'il côtoie. À côté de rabbins la barbe lui pousse et il devise en yiddish, en présence de Chinois ses yeux se brident et il parle couramment chinois, dans un groupe de jazz sa peau fonce et il brille à la trompette, entouré d'obèses il prend une cinquantaine de kilos...
C'est un mystère pour son époque, et de multiples médecins et psychiatres se penchent sur son cas, sans succès. Jusqu'à ce que le Dr Eudora Fletcher (coucou Mia Farrow), une jeune psy, s'intéresse à son cas étonnant, et devine une origine d'ordre psychanalytique. Elle arrive à s'occuper exclusivement de Zelig ; évidemment ils tombent amoureux, parce qu'on est en 1983 et que Woody Allen met en scène les femmes de sa vie dans ses films.

Zelig est un film typique de Woody Allen : plein de qualités avec quelques défauts, attachant, loufoque, qui parle pendant une bonne demi-heure de psychanalyse... Les défauts d'abord : c'est parfois un peu longuet, notamment à cause de ce ton documentaire. C'est une idée assez marrante, mais à mon avis elle s'essouffle assez vite, en grande partie parce que la grosse voix off, au ton assez ronflant — ça fait partie de l'esprit parodique, évidemment — devient rapidement pénible. Et ça rejoint mon aversion naturelle pour la voix off : quand je regarde un film, je n'ai pas envie qu'on me raconte l'histoire, j'ai envie de la voir, de la ressentir, de la vivre !
Ce défaut s'estompe un peu dans la seconde partie, quand un cousin du Dr Fletcher filme les entretiens de celle-ci avec Zelig. On passe ainsi plutôt en narration directe, et ça marche mieux. Aussi parce que c'est là qu'Allen s'amuse le plus avec les dialogues, sortant des aphorismes spirituels et très bien sentis, tout en noirceur.
Dans tous les cas, Allen s'en donne à cœur joie dans une série de portraits de médecins stupides, fats et incompétents, et dans de joyeuses incursions iconoclastes dans l'Histoire du XXe siècle.
C'est dans tous les cas, pour moi, un film plus réussi que La Rose Pourpre du Caire (1985, deux ans après Zelig). Certainement un peu moins profond, plus léger, mais peut-être qu'il correspond simplement plus à ce que Woody Allen fait de mieux dans cette période : des farces qui s'assument, des films loufoques, drôles, aux dialogues brillants.

Rédigé par Vincent Sorel

Publié dans #cinéma, #Woody Allen, #comédie, #États-Unis

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